Si la crise a fortement impacté la gestion du capital humain, les entreprises ont tout mis en œuvre pour préserver l’emploi et les compétences selon Jean-Marc Salvanes, associé-fondateur du cabinet Misceo, et organisateur du Trophée du capital humain créé par Michael Page International et le Monde.
Comment la crise a-t-elle impacté la gestion du capital humain dans les entreprises ?
Ce qui m’a frappé le plus en organisant le Trophée du capital humain*, c’est que les grands groupes ont mobilisé pendant cette crise tous les moyens managériaux techniques, financiers et législatifs à leur disposition pour préserver l’emploi et les compétences. Et ce, même dans les secteurs qui ont été le plus fortement affectés par la récession. Si l’on prend par exemple l’automobile, les constructeurs ont multiplié les initiatives pour limiter les plans sociaux : recours au chômage partiel, à la formation, à la mobilité interne...
Est-ce pour vous un phénomène nouveau ?
Oui, à certains égards... Je ne dis pas que lors des crises précédentes, les entreprises n’ont pas eu le souci de protéger leurs collaborateurs, mais cette volonté de préserver à tout prix le capital humain, qui constitue la principale richesse d’une entreprise, me semble effectivement nouvelle. Sans doute est-ce la conscience des limites des politiques de Stop and Go.
Quelle stratégie les entreprises ont-elles adopté en matière de rémunération ?
Beaucoup ont été amenées à geler les salaires, cette décision ayant d’ailleurs été très bien comprise par des collaborateurs qui ne pouvaient pas ignorer l’impact de la crise sur les carnets de commandes... Car lorsque la conjoncture se dégrade, tout va mal : l’intéressement, la participation, les bonus… Mais là encore, il y a eu beaucoup d’initiatives pour limiter les effets de la récession, comme par exemple l’aménagement de critères pour maintenir des niveaux d’intéressement assez élevés. Dans le cadre de l’actionnariat salarié, les entreprises ont distribué des actions gratuites ou à des prix décotés, avec des systèmes de garantie de performance. Chez Renault, des systèmes de solidarité ont même été mis en place pour permettre aux collaborateurs placés en temps partiel de conserver un revenu net équivalent à celui d’un travail à temps plein.
Quid du dialogue social, généralement malmené en période de crise ?
Les statistiques fournies par le ministère du Travail confirment notre analyse des pratiques des grands groupes : l’année 2009 a été une année record en termes de conclusion d’accords. Cette crise a en réalité généré un vrai travail de concertation. Les entreprises ont œuvré en collaboration très étroite avec leurs représentants du personnel afin de trouver des formes de consensus sur toutes ces initiatives innovantes qui devaient leur permettre de faire face à une situation particulièrement critique. Cette volonté participe à mon sens d’un phénomène plus large, qui renvoie au retour de l’esprit d’équipe dans la stratégie des entreprises. Après des années marquées par la prédominance de la performance individuelle, qui restera essentielle, on sent bien aujourd’hui qu’elles reviennent aux valeurs de la performance collective... Cette crise a permis une vraie prise de conscience de la part des entreprises qui se sont remises à jouer collectif.
Source : Focus RH, propos recueillis par Yves Rivoal, le 8 juillet 2010
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