samedi 27 mars 2010

Outsourcing : les deux conditions du succès au-delà du contrat

Par Richard Peynot, consultant et analyste partenaire de ITMP

Le mode de gouvernance et la nature des relations entre équipes participent du vrai succès ou du vrai risque d’un contrat d’externalisation (1). Dans les années 2001 à 2004, les cabinets d’analystes avaient l’habitude d’écrire, à propos de la gestion des contrats d’externalisation informatique, « tout est dans le contrat ». Je me souviens même d’une publication intitulée Outsourcing: all is in the contract (2). De nombreux clients se trouvaient en plein désarroi devant la tournure que prenaient leurs contrats d’outsourcing récemment signés.
 
Les cabinets publiaient alors rapport après rapport sur les éléments à mettre dans les contrats : les clauses de réversibilité, l’indispensable due diligence, les clauses de responsabilité et dédommagement, des tables de SLA (Service Level Agreement), etc. A chaque fois qu’un client soumettait l’examen d’une situation difficile, on répondait « que dit votre contrat ?». Et il était facile de trouver plusieurs failles dans le contrat. Ce n’est qu’à partir des années 2004-2005 que l’on s’est davantage penché sur la structure de gouvernance et les processus d’interaction avec le fournisseur. Il serait maintenant temps de prendre en compte la nature des relations entre les deux parties.

Aller au-delà du contrat
Au travers de nos missions de conseil en externalisation, nous nous rendons bien compte que certes la solidité et la précision du contrat sont indispensables. Mais jamais le contrat lui-même, si parfait soit-il, ne garantit totalement la bonne exécution des prestations de services, n’assure d’un bon niveau technique des ressources du fournisseur et surtout ne protège pas contre la dégradation des relations avec le temps.

Au delà d’un contrat solide, deux conditions sont essentielles et indissociables pour réussir une relation d’infogérance. L’une sans l’autre n’a pas de sens.

1 - Une bonne gouvernance du contrat.
Cela suppose d’abord une vraie structure de gouvernance, une équipe chargée de suivre et contrôler l’exécution du contrat, constituée de personnes compétentes et motivées.
- Compétentes : elles comprennent bien le métier et les domaines externalisés, se sont approprié le contenu du contrat, et maîtrisent bien les frontières entre les périmètres de responsabilité.
- Motivées : c’est un métier comme un autre, qu’il faut avoir envie de pratiquer et de mettre au service des intérêts de son entreprise. Pour cela il faut prévenir l’amertume des personnes qui peuvent se sentir dépossédées du territoire qui était le leur auparavant. Il faut une équipe rénovée et des personnes qui acceptent de migrer vers ce nouveau rôle. La gouvernance suppose aussi des processus de fonctionnement entre client et fournisseur (conçus par le client et acceptés par le fournisseur, ou l’inverse), de façon à travailler de façon réellement partagée et non juxtaposée.

La bonne gouvernance veille aussi à la claire séparation des périmètres et prévient les dérives où les imbrications et co-participations diverses conduisent à la dilution des responsabilités.

2 – De bonnes relations quotidiennes entre les équipes.
Il ne suffit pas que les managers s’entendent bien et que le directeur de compte déjeune annuellement avec le DSI. Les tâches au quotidien impliquent des échanges permanents entre les collaborateurs du client et ceux du prestataire. Le management, de part et d’autre, doit veiller à ce que le ton ne se dégrade pas, que les reproches ou les accusations ne soient pas trop lourds en cas de manquement ou d’erreur de l’autre partie, et que les conflits soient vite désamorcés. Nous connaissons des contrats où le climat client-fournisseur est devenu irrespirable, chaque membre de l’équipe client fustigeant son fournisseur à tout propos et réciproquement. Il est difficile de récupérer une telle situation.

Une attention de tous les instants
Nous constatons d’ailleurs des liens fréquents entre ces deux points : la vie courante des prestations d’infogérance fournit de nombreuses occasions de désaccords entre les équipes. Si le management des deux parties n’exerce pas une présence suffisante et n’effectue pas les actes d’arbitrage, de gestion des priorités et de prise de recul, ces difficultés s’amplifient entre les individus et conduisent aux dérives évoquées.

La rigueur dans la gouvernance et le maintien d’un climat de confiance et de collaboration sont probablement encore sous-estimés et immatures. Le référentiel eSCM (e-Sourcing Capability Model) peut certainement aider les entreprises sur ces deux points. Il décrit les bonnes pratiques de gestion du cycle de vie du sourcing informatique, de la réflexion stratégique à la gestion courante, en mettant l’accent sur la relation client-fournisseur.

(1) Article rédigé avec la participation de Philippe De Mauroy, consultant ITMP.
(2) Publication collective chez Forrester Research, à laquelle a participé Richard Peynot.
Source : IT Channel, "Outsourcing : les deux conditions du succès au-delà du contrat" par Richard Peynot, consultant et analyste partenaire de ITMP, 23 mars 2010
 

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