Dans son rapport sur la santé mentale, le Centre d’analyse stratégique pointe les principaux facteurs des troubles psychosociaux liés au travail.
Le Centre d’analyse stratégique (CAS) a remis, le 17 novembre, son rapport, intitulé « la santé mentale, l’affaire de tous, pour une approche cohérente de la qualité de la vie », à Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d’État chargée de la prospective. Ce rapport propose des pistes de réflexion en vue de lutter contre les risques psychosociaux d’origine professionnelle.
Des risques psychosociaux liés à l’organisation du travail
« L’existence et l’ampleur des risques qui pèsent sur la santé mentale des travailleurs ne sont désormais plus contestées », indique le CAS, qui analyse les principaux facteurs des troubles psychosociaux liés au travail.
• Évolution des modes de production et de l’organisation du travail. Depuis plus de 20 ans, on assiste à la promotion de la flexibilité, de la réactivité, de la polycompétence et de la polyvalence. Si ces évolutions peuvent permettre de plus grandes opportunités de responsabilités et des organisations moins hiérarchiques, elles font également peser de grands risques sur la santé mentale des travailleurs.
En effet, ce système connaît plusieurs paradoxes :
– les injonctions à l’autonomie sans donner de moyens effectifs, notamment du fait de la « procéduralisation » du travail ;
– l’exigence de qualité et la mise en place de pratiques contraires, par exemple satisfaire au maximum le client en y passant moins de temps ;
– l’affirmation du collectif de travail et le développement en parallèle de pratiques de plus en plus individualisantes ;
– l’importance accordée à la communication et le peu d’espace de parole au sein de l’entreprise ;
– l’obsession du court terme et l’importance des projections à long terme.
• Restructurations. En outre, les réorganisations des secteurs d’activité, les restructurations, la généralisation du recours à l’externalisation, à la sous-traitance, voire aux délocalisations sont désormais une pratique courante. Leurs conséquences sur la santé mentale des salariés ne sont toujours pas suffisamment prises en compte.
• Gestion des RH dans les TPE. La gestion des ressources humaines au sein des très petites entreprises, qui emploient près de 30 % du total des salariés en France, est souvent assurée par le dirigeant et l’expert-comptable, et donc de fait restreinte.
• Évolution du travail. La nature même du travail évolue et impose de nouvelles contraintes physiques et mentales avec une intensification du travail, des modes de travail concurrentiels et peu coopératifs entre salariés. Certains constatent au sein des entreprises et des institutions une altération des collectifs de travail, avec par exemple la mise en concurrence des équipes ou la forte rotation des personnels. En outre, certains souffrent d’un manque de reconnaissance du travail accompli.
Liaisons Sociales Quotidien, 4/12/2009.
• Prévention insuffisante. La gestion individuelle des troubles psychosociaux par le biais d’un psychiatre, psychologue ou médecin du travail, stratégie jusque-là privilégiée par les entreprises, n’est pas suffisante. Selon le CAS, il convient de s’attaquer directement aux causes premières des troubles psychosociaux.
Recommandations du CAS
Le CAS recommande de :
– favoriser un rapprochement entre santé au travail et santé publique ;
– confier à un organisme de santé publique, comme l’Institut de veille sanitaire, le soin de recenser l’ensemble des études sur les risques psychosociaux ;
– promouvoir des modes d’organisation du travail plus respectueux du bien-être ;
– à cette fin, mettre en place des démarches de sensibilisation et de formation des principaux groupes d’acteurs jouant un rôle clé, dans et hors de l’entreprise (grandes écoles formant les futurs managers, dirigeants des grandes entreprises, cabinets de conseil en organisation et en management, etc.).
– encourager l’évaluation des risques au sein de l’entreprise en mettant en place un système de détection de signaux avant coureurs ;
– mettre en place des actions territoriales au service de la santé mentale dans les PME ;
– inciter les CHSCT à organiser une concertation annuelle sur les risques psychosociaux et organisationnels, et lors de réorganisations ;
– faciliter le maintien dans l’emploi des salariés inaptes ou avec des problèmes de santé mentale ;
– faire mieux jouer la responsabilité sociale des entreprises, fondée sur des démarches de charte et de labels ;
– approfondir les politiques d’activation individuelle, mais aussi collective, en favorisant la formation continue et l’initiative économique. Ainsi, les sociétés coopératives de production, permettant un management humain, pourraient être développées.
Consulter le rapport du CAS : "la santé mentale, l’affaire de tous, pour une approche cohérente de la qualité de la vie".
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