Si la crise a fortement impacté les politiques et les pratiques RH, elle aurait aussi contribué à faire évoluer le rôle et la perception du DRH dans l’entreprise. Telle sont les principales conclusions d’une étude codirigée par Pierre-Yves Sanséau, professeur de GRH à Grenoble Ecole de management, auprès de 510 DRH. Interview…
Quels ont été les principaux effets de la crise sur les DRH ?
L’étude montre que pour près d’un sondé sur deux, la crise a très fortement ou plutôt fortement impacté les politiques et les pratiques de GRH. Ils sont encore plus nombreux à estimer qu’elle a eu des effets sur les activités et le rôle du DRH.
Quels leviers ont activé les DRH pour traverser la crise ?
L’étude montre que des mesures brutales comme le licenciement, le chômage partiel ou l’arrêt momentané de la production, n’ont pas été fortement mobilisées en France, comme cela a été le cas dans les pays anglo-saxons qui ont eux continué de privilégier une stratégie de stop and go. Les DRH français ont actionné des leviers de prévention et d’adaptation en privilégiant une nouvelle gestion de la formation, le gel des recrutements, l’accélération de la mobilité des salariés, la pose de congés obligatoires par les salariés, une nouvelle gestion des budgets RH... Il me semble qu’ils ont placé beaucoup d’énergie pour déployer toutes ces solutions qui, au final, ont permis de minimiser les impacts humains de la crise.
Comment le rôle du DRH a-t-il évolué pendant la crise ?
Malgré toute une littérature qui nous laissait entendre que le DRH était devenu un partenaire stratégique de l’entreprise, au même titre que les directions financières ou marketing, sur le terrain, la réalité était souvent toute autre… A part dans les grands groupes, sur la période 1995-2005, on peut dire que le rôle du DRH s’apparentait le plus souvent à celui d’un directeur du personnel. L’étude montre que sur les 24 derniers mois, les DRH auraient développé un rôle de partenaire stratégique dans l’entreprise, d’accompagnateur du changement, de coach auprès des managers, d’accompagnateur auprès de l’ensemble des salariés... A contrario, toutes les fonctions classiques du directeur du personnel, qui est là pour gérer la formation, le recrutement, la rémunération ou les relations sociales, ont finalement peu évolué. Nous ne nous attendions pas à des résultats aussi marqués. Il s’agit à mon sens d’un signal fort qui laisse à penser que la crise aurait servi de catalyseur dans beaucoup d’entreprises pour faire prendre conscience aux dirigeants que le DRH a joué un rôle extrêmement important dans la gestion de la crise, mais aussi dans la définition de la stratégie de l’entreprise. Paradoxalement, la fonction RH sortirait donc renforcée de cette crise.
Sur quels enjeux les DRH sont-ils attendus dans les mois qui viennent ?
Les enjeux corroborent tout ce que je viens de dire. En cette période de sortie de crise, les DRH estiment en effet qu’ils vont devoir s’impliquer encore plus dans leur rôle stratégique pour être mieux reconnus par la direction et ainsi s’imposer comme de véritables business partners pour l’ensemble de leurs clients internes. Ils devront aussi développer leur rôle d’accompagnateur des salariés et de conseil auprès des managers. Sur ce plan, ils ont vocation à devenir des supers consultants internes pour des managers qui se voient déjà confier une grande partie de l’activité RH comme la rémunération, la formation ou le recrutement.
Source : Focus RH, "Les DRH sortiraient renforcés de la crise", propos recueillis par Yves Rivoal, le 16 décembre 2010
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